Ouvrages & Chapitres

Comprendre l'insécurité personnelle

Le sentiment d'insécurité des jeunes dans les transports franciliens

2019

RMS Editions, Georg-Médecine & Hygiène

Interview réalisée par Alexandre Carré, journaliste chez Agora Média et animateur de l’émission Security Book

Janvier 2020

Le sentiment d’insécurité est un thème récurrent dans les sociétés démocratiques modernes. Journalistes et politiques l’évoquent sans relâche pour souligner diverses appréhensions de la population. Mais qu’est-ce que le sentiment d’insécurité ? Qui concerne-t-il, et que recouvre-t-il ? Derrière la simplicité apparente du terme, se cache en réalité un phénomène social particulièrement complexe. Construit sur des données empiriques, l’ouvrage étudie les mécanismes d’une des deux dimensions du sentiment d’insécurité : l’insécurité personnelle. Contrairement à la préoccupation sécuritaire, abstraite, qui consiste à placer la délinquance à la première place des problèmes à résoudre, l’insécurité personnelle se rapporte à la peur concrète de subir un vol ou une agression. Pour étudier cette seconde dimension, l’ouvrage porte la focale sur un exemple topique : l’insécurité personnelle des jeunes dans les transports en commun franciliens. À l’aide d’une enquête qualitative, l’auteur entend répondre à deux objectifs : expliquer le niveau de peur élevé dans les transports en commun et appréhender, à l’aide d’un modèle dispositionnel, l’ensemble des variations individuelles de l’insécurité personnelle.

La mauvaise réputation (du RER)

Dans Boirat et al., Les passagers du RER, pages 95 à 107

2019

Editions Les Arènes

En Île-de-France, le RER est le mode de transport le plus anxiogène, devant le métro, le transilien, le bus et le tramway: en 2017, un tiers des franciliens déclarent avoir peur, au moins de temps en temps, d’y être victime d’un vol ou d’une agression. Ce chapitre – La mauvaise réputation – cherche à expliquer ce phénomène. Après avoir identifié le profil sociodémographique des personnes qui se disent inquiètent dans le RER (surtout des femmes, des jeunes, et des résidents de grande banlieue), l’auteur montre que l’insécurité personnelle – si elle est liée aux expériences menaçantes – tient davantage aux configurations de ce mode de transport qu’aux vols et aux agressions, finalement relativement rares.

Quelles spécificités des méthodes d'investigation qualitatives pour étudier l'insécurité personnelle dans les transports publics urbains ?

Dans Boucher, Enquêter sur les déviances et la délinquance. Enjeux scientifiques, politiques et déontologiques, pages 111 à 132

2015

L’Harmattan

« En s’appuyant sur la réalisation d’une enquête portant sur la peur des étudiants franciliens dans les transports collectifs, Julien Noble s’intéresse aux spécificités des méthodes qualitatives pour étudier le sentiment d’insécurité. Dans cette perspective, prenant acte qu’ « un chercheur doit constamment veiller à inscrire ses inspirations scientifiques dans le cadre des contraintes que lui impose son sujet d’étude pour assurer le bon fonctionnement de son enquête », Julien Noble interroge le choix d’un dispositif méthodologique qualitatif spécifique. Dans la pratique, alors que l’auteur souligne que « les transports publics urbains constituent un terrain d’étude peu favorable aux méthodes d’investigation qualitatives », après avoir fait un bref état des lieux des travaux récents réalisés sur le sentiment d’insécurité dans les transports collectifs, il définit les opérations nécessaires à la conception d’une enquête : la construction de l’objet d’étude, le choix du terrain de recherche et de la population étudiée ainsi que les difficultés qu’il a dû dépasser mais aussi comment il a adapté son protocole de recherche aux contraintes extérieures. Néanmoins, il explique également comment il a pu tirer avantage de certaines réalités personnelles pour étudier le sentiment d’insécurité, notamment sa position de chercheur au sein de l’Université Paris 13 qui est implantée dans un territoire, celui de la Seine Saint Denis, particulièrement anxiogène. De façon minutieuse, Julien Noble dévoile ses stratégies d’enquête et la façon dont il a concrètement réussi à recruter ses enquêtés tout en s’assurant que son échantillon, bien que non exhaustif, soit en revanche suffisamment représentatif de la population estudiantine d’Île-de-France. Après avoir présenté l’intérêt des méthodes d’investigation qualitatives mobilisées dans plusieurs travaux étudiant l’insécurité personnelle (prise en compte des dimensions affectives, cognitives et comportementales), Julien Noble décrit alors les techniques d’entretien qu’il a lui-même utilisées dans son enquête. Pour étudier le sentiment d’insécurité, il souligne notamment l’importance de réaliser des entretiens non directifs qui « permet d’appréhender la complexité du phénomène social étudié par la liberté d’expression qu’elle propose aux enquêtés ». En effet, Julien Noble indique la nécessité de mobiliser des techniques d’entretien qui facilitent, du côté des enquêtés, au-delà de leur « socialisation de genre », la libéralisation de la parole sur des sujets tels que la sécurité et l’insécurité particulièrement « connotés politiquement », socialement et sexuellement. En définitive, pour compléter la connaissance du sentiment d’insécurité dans les transports collectifs largement produite grâce à la réalisation d’enquêtes quantitatives, Julien Noble plaide pour une plus grande utilisation et nécessairement rigoureuse des méthodes qualitatives pour étudier ce phénomène complexe et largement subjectif. »

Manuel Bouchet, 2015, Enquêter sur les déviances et la délinquance, enjeux scientifiques, politiques et déontologiques, L’harmattan, p.94

L'insécurité personnelle des jeunes dans les transports en commun franciliens

Une étude dispositionnelle du sentiment d’insécurité

2015

Thèse de doctorat, Université Sorbonne Paris Cité

L’enquête victimation et sentiment d’insécurité réalisée par l’IAUîdF montre que près d’un francilien sur deux redoute d’être agressé ou volé dans les transports en commun. Basée sur une trentaine d’entretiens réalisés auprès d’étudiants de l’Université Paris 13, cette étude vise à rendre compte des mécanismes de production de ce phénomène social. Deux principaux résultats émergent de cette recherche. On identifie d’abord trois catégories de facteurs à l’origine de l’insécurité personnelle dans les transports collectifs. La première, de nature sociale, insiste sur la perception du risque suscitée par l’isolement et certaines catégories d’usagers. La seconde est liée aux modalités de fonctionnement des transports en commun, dont certaines caractéristiques renforcent la peur des voyageurs. La troisième porte sur l’architecture et plus spécifiquement sur le cloisonnement des espaces et ses différents effets selon le nombre d’usagers. À l’aide du concept de disposition, on propose ensuite une explication aux nombreuses variations individuelles en matière de perception du risque de victimation. On insiste alors sur le passé incorporé des enquêtés, façonné sur la base des expériences menaçantes, des représentations du danger et des caractéristiques individuelles de chacun, pour rendre compte de leurs réactions dans les situations présentes. Cette analyse permet de dégager deux profils d’usagers, chacun subdivisé en trois sous-profils. Les sécures d’abord rassemblent les fragiles, les assurés et les tranquilles. Les inquiets ensuite se répartissent entre les vigilants, les protégés et les résistants